Lambda sur l’onde, PTV et RMS
L’astronome amateur est confronté dès qu’il s’intéresse un peu à la mesure de la qualité des optiques au jargon des opticiens dont les fameux L/4, L/8, PTV, RMS et autres acronymes qui peuvent être abscons de prime abord.
La mesure d’un système optique peut se faire de multiples façons : Interférométrie, test de Roddier, star test, Foucault ou analyse du front d’onde. De même une optique peut être testée dans son intégralité, pourquoi pas oculaire compris, ou bien partiellement – uniquement le miroir primaire ou l’objectif d’une lunette – pour distinguer les problèmes optiques des problèmes mécaniques.
Si l’on s’en tient uniquement à l’optique d’un instrument, on attend d’elle pour une application astronomique qu’elle transforme un front d’onde plan en front d’onde sphérique. Les défauts de cette optique seront donc les écarts du front d’onde résultant par rapport à un front d’onde sphérique parfait ayant pour rayon la focale de l’instrument.
Souvent par simplification on représente du front d’onde simplement d’écart par rapport à la sphère parfaite en faisant abstraction de la forme sphérique globale.
Pour mesurer les écarts entre l’onde parfaite et le résultat réel, il faut une unité de distance. Les écarts sont en général très petits : quelques dizaines de nanomètres.Une première façon de faire est de mesurer directement l’écart du front d’onde réel au front d’onde théorique en nanomètres. C’est simple, efficace, lisible et surtout universel.
Une seconde façon de faire est de mesurer l’écart » sur le verre ». En effet, l’écart entre le front d’onde théorique et le réel provient bien d’un défaut du système optique, ponctuellement trop épais ou trop fin par rapport à ses côtes idéales. Ce type de mesure a pour avantage de bien mesurer le défaut de l’optique elle-même et de voir en cours de fabrication quelles sont les corrections à apporter. En revanche, l’impact que va avoir le défaut d’un miroir n’est pas le même que celui d’un objectif de lunette. Imaginons un défaut de 10 nm en creux sur une lentille, et sur un miroir. Sur la lentille, le verre ne sera pas ralenti sur 10 nm avant d’atteindre le dioptre. Si c’est le seul défaut présent à cet endroit, le défaut provoquera une bosse de 10 nm sur le front d’onde, voir un peu plus ou un peu moins en prenant en compte les différences de vitesse de la lumière dans l’air et le verre. Dans le cas du miroir, la lumière devra parcourir 10 nm de plus avant que d’être réfléchie. Une fois réfléchie, elle devra reparcourir ces 10 nm en sens inverse. Au final, le défaut sur le front d’onde sera un creux de 20nm. On voit donc que mesurer les défauts sur le verre rend difficile par comparaison des systèmes optiques entre eux. En revanche cette méthode a pour avantage pour les constructeurs de miroirs de donner des résultats plus flatteurs, attention à bien identifier à quoi le fabricant fait référence.
Une troisième manière de faire est de considérer la taille du défaut en déphasage de l’onde par rapport au front d’onde parfait. Dans le cas d’un défaut de 63 nm pour une onde rouge à la longueur d’onde de 632 nm, on dira que l’onde est, à cet endroit, en retard ou en avance de 1/10 d’onde. Ou que le défaut est de Lambda/10 (L/10). Ce type de formalisme présente comme avantage de donner des nombres assez petits, et de pouvoir directement être lisible sur des phénomènes d’interférence dont les écarts entre franges sont aussi en lambda ou demi lambda. En revanche, on comprend que la mesure est très dépendante de la longueur d’onde de la lumière incidente. Un défaut de 63 nm avec une lumière à 632nm donne un résultat de L/10. Si la lumière est à 532nm, ce même défaut est de L/8,5 ce qui semble moins bon. Plus petit est le diviseur, plus mauvais semble le résultat. Il faut donc faire attention lorsqu’on compare des valeurs que la mesure ait été faite avec la même longueur d’onde. Pour homogénéiser les résultats, on ramène souvent les mesures à une longueur d’onde de référence de 550nm.
Exemple de front d’onde d’une bonne lunette APO
Une fois les mesures faites en tout point de la surface de l’optique, on utilise deux mesures synthétiques pour rendre compte simplement du résultat global :
Le PTV, ou Peak To Valley. Il s’agît de la mesure crête à crête qui donne l’écart maximal entre la valeur la plus basse et la valeur la plus haute. Si une optique est ponctuellement, au pire, en creux de 13nm, et en bosse de 34nm, le PTV sera de 13+34=47nm. Ramené à une longueur d’onde de 550nm, cela revient à une optique L/11,7 PTV (soit 550/47). La pertinence de cette mesure dépend beaucoup du test et de sa résolution. Elle doit donc être interprétée avec prudence.
Le RMS, ou Root Mean Square – Racine carré de la Moyenne des Carrés. Cette mesure est calculée en faisant la racine carrée de la moyenne des carrés des valeurs sur la surface. C’est donc un lissage de toutes les erreurs du front d’onde qui donne une valeur moyenne de l’erreur. Cette donnée est toujours meilleure que le PTV qui donne le pire des cas, mais est bien plus significative de la qualité générale de l’optique.
Il faut noter que ces valeurs dépendent beaucoup du type de mesure. Un test au senseur de courbure ne donnera pas forcément le même résultat qu’un interféromètre ou qu’un test de Foucault. Un test avec une résolution faible aura tendance à sous évaluer le PTV par exemple. Néanmoins les matériels professionnels comme les interféromètres de Fizeau à décalage de phase ou les analyseurs de front d’onde Shack Hartmann donnent des mesures très proche entre elle et dont la précision est supérieure à L/100.
Il est également intéressant de compléter ces données avec une analyse qualitative de l’état de la surface optique pour juger de micro défauts qui ne seront pas pris en compte par un instrument de mesure, mais qui pourront provoquer de la diffusion. Le rapport de Strehl est aussi à prendre en compte car il donne une vision très synthétique. Enfin la FTM est aussi une donnée importante pour le contraste de l’instrument.